Tout ce que vous n'avez jamais voulu savoir sur l'épargne et que vous osez désormais demander7/4/2018 La période des vacances est souvent propice à de grandes réflexions (et à de grandes effusions de joie et de communion populaire cette année, bravo les Bleus !), qu’elles soient existentielles ou plus terre à terre. Loin du tumulte de la vie quotidienne, des urgences professionnelles, et confortablement installé dans votre transat, vous pensez peut-être à la scolarité de vos enfants, aux travaux de rénovation de votre appartement, aux dépenses imprévues de la rentrée ou tout simplement à vos prochaines vacances. Et à juste titre, vous vous demandez combien il reste sur votre livret et si vous avez fait ce qu’il fallait pour optimiser votre épargne. On se préoccupe de l’épargne pour ce qu’elle nous permet de réaliser quand on s’en sert, beaucoup plus rarement pour ce à quoi elle est utilisée quand on la laisse fructifier (plus ou moins bien d’ailleurs, on le verra dans un prochain article) à la banque. Dans le rétro (pour les Alain Decaux en herbe, mais pas que…)Saviez-vous que le mot épargner vient de « esparigner » signifiant « ne pas tuer, laisser vivre » ? Ainsi, l’épargne serait une façon de ne pas « tuer » son argent et de le faire fructifier utilement. Pourtant, depuis plus de trois siècles, bien placer son argent est synonyme de rentabilité financière. Jusqu’à très récemment, un placement n’était considéré qu’au travers des intérêts ou de la plus value qu’il pouvait générer. Historiquement, c’est à la révolution industrielle au 19ème siècle que l’on doit les premières initiatives autour de l’épargne grand public. Le prolétariat subit de profondes mutations et le salariat de masse fait son apparition. De nombreux ouvriers, bien que rémunérés, se trouvent en situation d’endettement. Un banquier philanthrope du nom de Benjamin Delessert fait de la condition ouvrière sa cause et décide de créer la première caisse d’épargne et de prévoyance en 1818. Pour la première fois en France, un bourgeois tout comme un ouvrier peut déposer une somme d’argent pour réaliser des projets de long terme. Durant les Trente Glorieuses, les salariés se voient offrir des supports d’épargne, tendance accentuée par la mensualisation des salaires et l’augmentation du pouvoir d’achat à partir des années 70. En 1997, la création de nouveaux dispositifs d’épargne salariale vient renforcer les encours globaux de l’épargne. Enfin, les nouvelles technologies et la démocratisation d’internet modifient les règles du jeu de l’offre et de la distribution des produits d’épargne au travers notamment de banques en ligne (souvenez-vous de vos 1ers trades sur boursorama) et plus récemment de nouveaux entrants sur le marché du financement participatif (nous y reviendrons dans un prochain article). “épargner” en France, kezako ?L’épargne est l’argent qui n’est pas dépensé, ce qu’il vous reste à la fin du mois quand vous avez fait face aux “dépenses courantes”. Elle représente environ 14% des revenus des Français, les plus gros épargnants d’Europe (en gros, 60% en immobilier, 40% en épargne financières). Parmi les placements financiers préférés des Français – vous vous reconnaitrez certainement -, figurent le Livret A et le LDD et, loin en tête, l’assurance vie en euros. Rien d’étonnant car, nous, Français, sommes connus pour ne pas avoir la culture du risque en matière de finance ! D’où des préférences individuelles pour des placements sûrs, gérés en « bon père de famille ». Dit autrement, nous mettons au cœur de nos priorités la garantie du capital, idéalement agrémentée d’incitations fiscales. Aujourd’hui, l’épargne financière des Français, c’est presque 5 000 milliards d’euros ! Oui, vous avez bien lu ! Mais peut-être pas bien réalisé le potentiel d'impact considérable de ce magot. Imaginez, avec 2% d’intérêts (donc sans toucher au capital), les Français pourraient à eux-seuls financer les 100 milliards d’euros annuels demandés aux Etats-Membres par l’ONU pour régler l'impact du réchauffement climatique dans les pays en voie de développement.. A quoi sert votre épargne financière ?Mais alors, qu’est-il fait de notre argent et qu’en savons-nous ? Selon une étude menée en 2017 par Opinion Way pour le compte de Robin’ Finance, 80% des personnes interrogées estiment que l’épargne sert d’abord à financer les activités des banques, en particulier leur fonctionnement et développement et leurs investissements. 69% pensent qu’elle alimente la spéculation financière. Autre chiffre à retenir : 52% considèrent qu’une partie de leurs fonds est affectée au financement de la dette publique. Trop abstrait, pas assez vertueux, ce fléchage serait-il jugé décorrélé de l’économie réelle ? En théorie, l’argent du Livret A, du LDD et des livrets d’épargne logement est essentiellement prêté à l’Etat et aux collectivités qui l’utilisent pour construire des logements sociaux, des routes, des écoles, des hôpitaux, pour financer la transition écologique… Dans les banques, l’épargne peut aussi être transformée en crédits bancaires à destination des ménages ou des entreprises. Autre relais de croissance des entreprises : l’épargne investie dans les marchés financiers au travers de produits tels que le PEE[1], PEA[2], PERCO[3], comptes titres ou assurance vie. L’argent peut également être investi en bourse via des fonds d’investissement, des OPC[4]ou des SICAV[5]. Ainsi, quand nous détenons (directement ou indirectement) des actions d’une entreprise, cela signifie que nous sommes propriétaires d’une partie de son capital et lui donnons les moyens de son développement. En investissant en obligations, nous prêtons de l’argent aux entreprises ou collectivités. En pratique, l’argent de notre épargne est souvent sous-exploité : les crédits bancaires sont très peu accordés aux individus qui sortent des profils standard ou aux jeunes entreprises innovantes qui construisent le monde de demain. Moins de 20% des montants épargnés sont injectés dans l’activité économique. ______________________________________ [1] Plan Epargne Entreprise [2] Plan Epargne en Actions [3] Plan d’Epargne pour la Retraite Collectif [4] Organisme de Placement Collectif [5] Société d’Investissement à Capital Variable La nouvelle donneLes temps changent et la façon d’investir aussi. Et si on pouvait simultanément préparer son avenir et prendre soin du monde ? Paris, rue de Toul, 12ème arrondissement : la construction de 53 logements sociaux vient d’être lancée. “Rien de nouveau sous le soleil” rétorquerez-vous. A quelques différences toutefois. Ce projet innovant, porté par la société Perl en partenariat avec la Fondation Abbé Pierre, intègre par exemple les principes de l’économie circulaire : la résidence accueillera une chaudière numérique réutilisant la chaleur de serveurs informatiques. Mais surtout, ce programme immobilier a été non seulement co-construit avec les riverains du quartier, mais aussi financé par l’épargne de particuliers ! Conscience is the new bankEn synthèse et sans verser dans le militantisme écolo-bobo ou altermondialiste, on observe et on prend conscience un peu plus tous les jours que notre mode de développement atteint ses limites. On aspire à plus de cohérence entre nos valeurs, notre vision du monde et nos actes au quotidien, qu’il s’agisse de s’alimenter, de s’habiller, de voyager, de se déplacer et même de travailler ! Et naturellement, on s’intéresse de plus près à notre épargne, à comment on peut en reprendre le contrôle (délégué jusque-là à des banques peu à l’initiative en matière de développement durable) et l’utiliser pour s’attaquer à des problèmes qui nous tiennent à cœur. Rendez-vous la semaine prochaine, on vous explique comment s’y prendre concrètement ! D’ici là, on vous souhaite de longs débats éclairés sur le sens de l’épargne et de joyeux apéros en famille et entre amis… ou l’inverse ;) Trois inspirations pour la route, à partager avec vos voisins de serviettesLe Marc Toesca de la semaine : “ The Times They Are A Changin' ”, Bob Dylan, 1964 https://www.youtube.com/watch?v=e7qQ6_RV4VQ Le 3615 de la semaine : le très bon manifeste du secours catholique pour que la finance soit rendue aux citoyens http://lafinanceauxcitoyens.org/ Le Droit de Réponse de la semaine : Pierre Rabhi, “Les excès de la finance ou l'art de la prédation légalisée”, pour en savoir plus sur les fondements de la crise de 2008 https://www.leslibraires.fr gisemo vous propose tout l’été un article hebdomadaire pour vous familiariser avec l’épargne éco-responsable, sans vous prendre la tête : découvrez les 36 façons d’épargner de manière performante et durable et sachez dénicher les meilleurs placements éthiques, green ou solidaires.
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Yannépargnant éco-responsable convaincu et consultant fintech souhaitant partager son expérience, fondateur de gisemo Archives
Janvier 2019
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